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L'ADNe au service de la pêche : une technique imparable !

Cette nouvelle technique scientifique permet de suivre le front de colonisation de l’alose dans certaines rivières. Il est désormais possible de détecter l’ADN de la plupart des poissons d’eau douce.

Crédit photo Laurent Madelon
On se croirait dans un épisode de la série télévisée Les Experts ! Il est aujourd’hui possible d’analyser l’eau d’un fleuve, d’une rivière ou d’un lac et d’identifier les espèces qui y vivent grâce à leurs traces d’ADN : c’est l’ADNe ou ADN environnemental. Cela va aider le monde de la pêche.

Au printemps dernier, l’association Seine Normandie Migrateurs a participé à une campagne de prélèvements d’ADN environnemental sur le bassin de la Seine. L’objectif était de repérer la présence d’aloses. Pas besoin de piège photographique dans une passe à poisson, de radiopistage ou d’étude acoustique. À l’aide d’une pompe, les outils semblent d’ail eurs assez sommaires au premier abord, il suffit de prélever de l’eau du fleuve, pour ensuite l’analyser et repérer l’ADN des poissons migrateurs ! « La technique existe déjà depuis quelques années, nous explique Florian Deshayes, directeur de l’association Seine-Normandie Migrateurs. Elle est relativement pratique pour aller chercher des traces d’individus (écailles, sécrétions…) quand il n’y en a pas beaucoup, sur des zones où les espèces sont difficiles à suivre, pour un coût relativement restreint. Ici, on a cherché des aloses sur le bassin de la Seine, dans un milieu très vaste, c’était la bonne technique pour quelques centaines d’euros. »

Cette nouvelle technique ne demande pas un investissement matériel et humain très lourd, comme ici sur l’Eure à Val-de-Reuil pour les prélèvements réalisés entre avril et mai. 
Crédit photo : Seine-Normandie Migrateurs

Catalogue d'ADN

À pied et en bateau, le personnel de Seine-Normandie Migrateurs et de l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), instigateur de l’étude, a donc prélevé de l’eau aux mois d’avril et mai en cinq points : deux sur la Seine (Poses et Suresnes), un sur l’Eure (Val-de-Reuil), un sur l’Oise (Pontoise) et un sur l’Aisne (Carandeau). « Les sites n’ont pas été choisis au hasard, justifie Florian Deshayes, l’ADN se dégrade au bout de quelques jours dont il faut être au plus près des zones susceptibles d’abriter des aloses. » Le principe est simple : « On ne prélève pas qu’un verre d’eau, c’est plus complexe, décrit le directeur de Seine-Normandie Migrateurs. Avec une pompe ou des seringues, on a aspiré et filtré quelques dizaines de litres d’eau, pour fixer des éléments sur une membrane. Les échantillons ont ensuite été envoyés en Haute-Savoie, à l’Inrae. » Cela fait une dizaine d’années maintenant que l’institut de Thonon-les-Bains travaille sur l’ADNe et depuis 2018 sur la détection des poissons. La majorité des espèces françaises sont référencées, il existe aussi des catalogues internationaux.

Les aloses identifiées

Les résultats n’étaient pas encore officiels lors de notre entretien, mais les premiers retours étaient positifs : « Nous savions que l’alose était présente sur certains secteurs grâce aux remontées des pêcheurs ou aux pièges photographiques des passes. Mais là, sans dévoiler les résultats que nous n’avons pas encore au complet, sur l’axe Eure, nous avons eu des détections positives alors que nous ne savions pas qu’il y en avait. Nous allons pouvoir lancer de nouvelles études. Ça va nous permettre d’affiner le front de colonisation, de savoir jusqu’où les poissons remontent, de comprendre combien il y en a, à quel moment ils se reproduisent. »

L’eau de la rivière, du fleuve ou du lac est filtrée et les échantillons sont soigneusement emballés avant d’être envoyés à l’institut de l’Inrae à Thonon-les-Bains.
Crédit photo : Seine-Normandie Migrateurs

Un bel avenir

L’ADNe s’inscrit pour le moment en complément des pêches électriques car elle ne permet pas de quantifier le nombre exact, le sexe ou encore la taille d’individus (un jour, peut-être…), mais elle ouvre de nouveaux horizons : « En comparaison aux méthodes traditionnelles, l’ADNe est plus sensible avec des détections de signaux rares et précoces, moins invasive car il n’y a pas de prélèvement d’individus, et d’un plus haut débit. Nous avons la capacité de traiter un grand nombre d’échantillons simultanément », liste Isabelle Demaizon, directrice de l’Inrae de Thonon. Elle permet de faire un bilan de santé d’une rivière après une pollution, de prévenir la présence ou non d’espèces invasives… Les progrès sont constants et l’ADNe peut même être aujourd’hui utilisée en analysant l’air ambiant ! Et qui sait un jour, à la place d’un sondeur avec la technologie Live, il suffira peut-être pour nous simples pêcheurs de prélever une goutte d’eau pour déterminer en un instant si un brochet de 140 cm traîne dans les parages ou si la remontée des saumons a commencé ?

L’ADNe à grande échelle

Seine-Normandie Migrateurs n’est pas la seule à profiter des avantages de l’ADN environnemental. Cette année par exemple, l’association Migrateurs Rhône-Méditerranée a échantillonné l’Eyrieux, la Drôme, l’Ouvèze, l’Aude, le Vieux Rhône à Montélimar, la Têt… La Cellule Migrateurs Charente et Seudre a fait des prélèvements d’eau dans la Charente de Saint Simon à Ambérac entre le 10 et le 13 juin dernier, pour déterminer également le front de colonisation de l’alose.

 

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