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Gros chevesnes aux leurres : profitez de l'été indien

On associe souvent la pêche du chevesne aux leurres à l’été. Mais la période qui annonce la chute des premières feuilles est intéressante, surtout si les eaux restent claires. Il faut parfois descendre dans la couche d’eau, mais les pêches de surface, si ludiques, peuvent être encore rentables jusqu’à fin novembre. Des opportunités à saisir, notamment pour les pêcheurs fans de salmonidés qui, comme notre ami Thierry Bruand, entament leur longue traversée du désert.

Contrairement à mes amis pêcheurs de truites aux leurres exclusifs qui se précipitent vers les réservoirs quand les cours d’eau de première catégorie ferment, je préfère de loin aller traquer le gros chevesne du bord, en milieu naturel. Cette attirance pour ce poisson ne date pas d’aujourd’hui. Très jeune déjà, pêcheur au coup, j’adorais par-dessus tout les pêcher au stick. Et je peux même avouer, sur la durée, que c’est probablement mon poisson favori.

En rivière ou en canal, dès la fin de l’été, les chevesnes recherchent plutôt les eaux calmes. 
Crédit photo : Thierry Bruand

Encore agressif

Pour la pêche de nombreux carnassiers, les mois d’octobre et de novembre sont souvent excellents. Et le chevesne, poisson insectivore tout autant que carnassier, n’échappe pas à cette règle. Même si le gros temps fort de l’été est bel et bien derrière nous, il reste très agressif sur les leurres surtout si les températures restent clémentes. Et comme les étés «indiens» semblent se multiplier…

Thierry, ici devant le Grand Colombier, point culminant du Bugey, estime que le chevesne est bien plus difficile à approcher que la truite. 
Crédit photo : Thierry Bruand

Les meilleurs postes

S’ils fréquentent parfois les mêmes eaux que les truites, les gros chevesnes ont une sociabilité et des habitudes de mobilité plus complexes. Ils peuvent, au gré des configurations, être solitaires ou au contraire se regrouper à trois ou quatre individus, voire former d’impressionnantes colonies. D’une sortie sur l’autre et selon l’heure, ces regroupements se déplacent un peu. Une tendance assez logique se dégage toutefois: ils se tiennent moins dans les veines d’eau rapides qu’en été. En rivière, c’est donc dans les courants très lents et laminaires, les remous peu agités, les amortis de bordure et les zones de rupture vif-mort qu’il faut chercher. Dans les canaux et contre-canaux, aux courants plus lents, par définition, ce sera près des zones de refuge : embâcles, buses et tunnels, plaques de végétation, embarcation fixe, etc. Pêcher l’eau est possible mais il est plus excitant et plus efficace de pêcher à vue. Sur le haut Rhône, mon secteur favori, les eaux s’éclaircissent franchement à l’automne et c’est un jeu d’enfant de les repérer, équipé de l’indispensable paire de lunettes polarisantes. C’est assez facile car les poissons évoluent encore assez près de la surface à cette saison, surtout quand la luminosité est forte.

Méfiant, toujours, mais pas imprenable ! Celui-ci a fini par craquer pour un micro souple. 
Crédit photo : Thierry Bruand

À pas de loup

Pour mieux repérer les silhouettes rondes et sombres des gros chevesnes, il est préférable de se tenir en hauteur (berge élevée, pont, digue). Ensuite, l’approche doit être d’une extrême discrétion car les gros chevesnes sont ultra-méfiants, surtout en canal. Leur champ de vision est plus large que celui de la truite et ils peuvent vous remarquer de fort loin, même en arrivant franchement par l’aval. Si le chevesne reste peu mobile quand vous avez rejoint votre emplacement, c’est bien qu’il n’ait pas été dérangé. En revanche, s’il se déplace rapidement, mieux vaut laisser tomber… Plus que le choix du leurre, l’approche, c’est la clé de la réussite.

Le bon équipement

Je n’utilise qu’une canne –puissance UL (1-5g) ou L (2-10g)– pour la surface comme pour le fond, même s’il est tentant d’en prévoir deux. Elle est assez longue (2,10 à 2,70m) de manière à disposer d’un bras de levier pour bien propulser mes petites créatures à distance suffisante. La longueur facilite aussi les combats, le contrôle de la bannière ainsi que le rapatriement des leurres quand la végétation de bordure est abondante. Le moulinet (taille 1500 ou 2000) est équipé d’une tresse très fine prolongée par 1,50 m de nylon ou de fluorocarbone 20/100.

Surface et sub-surface : Insecter (Reins en gaut à gauche) , Woodlouse (Illex, au milieu), CRKSR 40F (Caperlan, en haut à droite), Notobug (Sakura, les deux en bas).
Crédit photo : Thierry Bruand

En surface

Insectes et baies tombant dans l’eau sont désormais plus rares mais les chevesnes restent régulièrement le nez en l’air. C’est donc en surface que j’attaque le plus souvent. En canal, comme en rivière si les poissons ne sont pas trop au large, j’utilise le fameux Woodlouse (Illex). C’est une créature souple et discrète, terriblement efficace dans les coloris foncés et qui retient bien les attractants. Mais ne pesant qu’un gramme, il se lance assez mal et s’il faut allonger le tir, je bascule sur l’Insecter (Reins), un poids lourd de 2,3g, ou carrément sur un leurre dur redoutable, le Notobug (Sakura). Les deux références, pesant 1,5 et 3,5g, partent bien plus loin.

Fond et entre deux eaux : U-Shad (Fishup, en haut à gauche), One Up Shad (Sawamura, en haut à droite), Worm Long Fin (Trout Essential, au milieu à gauche), Honey Worm (Berkley, au milieu à droite), Baffi Fly (Fishup, en bas à gauche), Dragonfly (Fishup, en bas au milieu) et HP Bug (OSP, en bas à droite). 
Crédit photo : Thierry Bruand

C'est juste le blanc...

Si les chevesnes sont décidés à monter, on le sait en général assez vite. S’il y a plusieurs individus, la compétition joue à plein et vous pouvez lancer très près des poissons, éventuellement juste sur l’arrière, pour déclencher une attaque réflexe assez rapide. Mais le plus souvent, mieux vaut lancer un ou deux mètres en amont et laisser dériver l’imitation. Généralement, le poisson va suivre sous le leurre avec nonchalance avant de le gober discrètement… ou le refuser au dernier moment. En général, je n’anime pas, même si quelquefois cela peut s’avérer payant. Quand les poissons sont très agressifs, un petit crank ramené assez lentement en subsurface est aussi une option. Mais c’est plutôt une tactique à employer en bateau, de la berge vers le large. Ma couleur favorite est alors le blanc, très visible de loin sous la pellicule. En revanche, stickbaits et poppers, leurres un peu trop agressifs pour la saison, restent à la maison.

On sait que Thierry adore pêcher la truite aux leurres mais on se demande s’il n’aime pas plus encore le chevesne!
Crédit photo : Thierry Bruand

Plus bas

Mais sur les postes assez profonds, les poissons rechignent parfois à monter. Si les eaux sont très claires, la pêche à vue est possible mais plus compliquée. Toutes sortes de leurres peuvent permettre alors de descendre dans la veine d’eau. J’utilise des petites créatures (teignes, mini-écrevisses, larves diverses) montées sur des têtes plombées de 1 ou 2 g. On se rapproche de la pêche de la truite mais avec des proies nettement plus volumineuses. Efficaces aussi, les worms que l’on fait plonger très lentement et onduler au gré du courant près d’une colonie d’individus repérés ou supposés. C’est redoutable dans les zones de remous. Pour pêcher encore plus creux, ou quand les eaux sont chargées, un petit shad de 5 à 8 cm, monté sur une tête de 2 à 5 g selon le poste, est alors la meilleure option.

Un beau 45 cm pris en surface, en novembre, au Woodlouse (Illex), un classique pour Thierry.
Crédit photo : Thierry Bruand

Surprise, surprise

Là aussi, il faut jouer sur l’effet de surprise. C’est souvent peu après l’impact, à la descente ou lors du premier rebond sur le fond, que le chevesne va saisir le shad. Et il est donc infiniment plus rentable de battre du terrain plutôt que d’insister. Et là encore, ma préférence va pour le blanc.

La saison des belles surprises

En rivière courante, octobre est propice à la diversité des espèces capturées comme le rappelait le grand Michel Duborgel dans son célèbre Calendrier du pêcheur. Une raison supplémentaire d’aller tenter les chevesnes. À titre d’exemple, voici les poissons que j’ai réussi à toucher lors de mes dernières saisons automnales, en pêchant le chevesne aux petits leurres: une truite fario dépassant la barre symbolique des 40cm, prise au Woodlouse; deux ides mélanotes proches du kilo et un beau rotengle, leurrés avec de petites créatures; un barbeau, quelques perches modestes et un brochet sans doute métré qui a fini par me couper au bout d’une vingtaine de minutes de combat, avec des petits shads. Plutôt sympa non, je ne me suis jamais plaint !

Sauve-bredouille

En bon pêcheur de truite, je n’hésite jamais à emporter une boîte de dendros ou de teignes car parfois, de façon assez incompréhensible, ces satanés cabots semblent imprenables aux leurres. J’utilise alors ces appâts naturels sur les mêmes montages que mes leurres souples, ce qui permet de sauver une sortie mal embarquée.

Bourrés d’attractants, les teignes et les worms sont conservés dans leur propre conditionnement. 
Crédit photo : Thierry Bruand

 

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