J’ai déjà évoqué ces endroits étonnants au cours de quelques sessions dont les retours ont été faits à travers des comptes-rendus au fil des derniers articles. Je vais, cette fois, entrer un peu plus dans le détail pour les pêcheurs désireux de tenter l’aventure.
Un spot sauvage
Je vais vous parler ici d’un spot sauvage qui, si on fait une sortie à la journée peut être sujet à visiter deux secteurs où l’on va pouvoir s’adonner à plusieurs techniques et profiter de plusieurs belles espèces de la rade de Brest. Ces spots se situent aux confluents de l’Aulne et de la rivière du Faou, le premier se trouve aux alentours de l’Île d’Arun. De cet endroit, vous pouvez soit aller sur les parcs situés entre la pointe du château et l’entrée de la rivière du Faou sur la berge en face, ou prendre les méandres de l’Aulne et pagayer vers l’île de Térénez, le cimetière des anciens navires de la marine et pêcher sur les spots à émissoles. Il y a eu de nombreux retours sur cette partie de rade et sur cette pêche particulière des yeux jaunes de la rade : les émissoles tachetées. Aujourd’hui, on va se diriger vers les parcs et leurs vestiges situés en entrée de la rivière du Faou. On accède à la mise à l’eau en prenant la D791 à la sortie du Faou, après quelques kilomètres, on tourne sur la droite, l’île d’Arun est indiquée. La route se termine sur un petit parking avec bac à déchets et éclairage avec radar de mouvements. Ces initiatives de traitement et de collecte des déchets sont à encourager, on commence à en voir à plusieurs endroits de la rade, mais il n’y en a pas encore partout.
Évitez de vous mettre à l’eau à marée basse par coefficients supérieurs à 70, les bordures sont envasées et il n’est pas facile de faire rouler le chariot avec le flotteur dessus. Ce coin est souvent fréquenté par les dorades royales et les grises, et même les bonites en fin d’été. Aujourd’hui, nous allons nous intéresser au bar au leurre de surface et sous la surface. Ne pas travailler ce spot par trop forts coefficients car cela se découvre bien et il ne reste pas beaucoup d’eau pour peigner de façon sérieuse cette zone de parcs, voir à planter le kayak dans la vase et devoir attendre le retour du flux de montante... Les marées de 40 à 70 de coefficients sont les meilleures pour ce secteur, ou du moins cela permet de bénéficier d’une plage horaire élargie, car il restera de l’eau en permanence autour des piquets de parcs. Nous allons utiliser les leurres choisis au fur et à mesure de la marée. Pour se faire, j’ai sélectionné quelques poissons nageurs de toutes tailles, évoluant dans toute la couche d’eau entre 3m sous la surface et la surface. Parfois, la météo bouscule nos habitudes avec le mauvais temps perpétuel et le vent, souvent soutenu, qui rend les dérives compliquées. La succession de coups de vent a brassé l’eau de la rade et l’eau est marron, autant dire qu’il n’y a pas du tout de visibilité, ce qui rend le schéma prévu de sortie caduque, alors il faut s’adapter. Après avoir essayé quelques petits poissons nageurs à ras des parcs et décidé quelques petits « barsets », je change mon fusil d’épaule et me dirige vers le cimetière de bateaux qui sera plus à l’abri des vents, je reviendrai sur les parcs avant l’étale de basse, ce sera plus calme.
Le cimetière de bateaux
Voici un spot qui suscite beaucoup de convoitises, on y vient de loin pour s’essayer à la royale, à l’émissole et aux bars. Situé au cœur de la forêt domaniale de Landévennec sur 465 hectares, l’Aulne serpente ici entre le massif du bois du Loch et le massif du bois du Folgoat. Ce sont aussi les terres de l’Abbaye de Landévennec, qui exploitait le bois pour la construction de châteaux, maisons, de bateaux de pêche et surtout la construction des navires de la marine Royale jusqu’au XVIIIe siècle. La marine nationale y met maintenant les navires en fin de vie en attente de leur déconstruction. Ces vieilles coques font partie intégrante du spot de pêche. La zone de prospection se situe de la nouvelle cale de mise à l’eau, côté élevage de truites de mer, jusque sous le pont de Térénez, trois méandres plus loin. Pour le bar, les débuts de descendante et débuts de montante sont excellents. Il faut privilégier les bordures de goémon en faisant évoluer un poisson nageur juste sous les pousses qui retombent des roches découpées. Les poissons, recherchant les crevettes, crabes et fourrage qui peuplent les bordures, y sont nombreux et les belles prises ne sont pas exceptionnelles. Au niveau des vieilles coques au mouillage, on peut y faire de belles pêches de bonites ; poissons nageurs en traîne lente derrière le kayak ou jig dans les chasses sont à utiliser en priorité. Les poissons de trois à six kilos sont bien présents et sur matériel léger, les montées d’adrénaline vous font chaud au cœur.
L’émissole tachetée
Le poisson roi sur ce spot est sans aucun doute l’émissole tachetée. On y vient de toute la France pour se mesurer à ces splendides prises. Je ne vais pas vous faire ici le descriptif de cette pêche, cela a déjà été fait et je l’ai évoquée dans d’autres articles, mais l’appât roi pour cette pêche est le crabe vert vivant. On peut aussi s’y essayer à la sardine, aux raies et roussettes, très présentes aussi dans le coin. Les émissoles rencontrées ici sont des poissons de six à quinze kilos pour les plus grosses, entre 80 cm et 1,50 m. Ce sont de puissants combattants et sur canne légère, le combat n’est jamais gagné d’avance. Il faut les rechercher dans les failles qui se trouvent au milieu du lit de la rivière. Dans les profondeurs de 20 mètres, certains jours, les touches s’enchaînent à un rythme effréné. Bien sûr, une fois dans le kayak et la photo souvenir faite, elles repartent très bien à l’eau. Je recommande ce spot, non pas pour la pêche, mais surtout pour l’ambiance qui y règne. Il y a souvent de la brume sur l’eau, du fait des thermiques, et voir les vieilles coques émergées de cette « purée de pois » est un spectacle vraiment magique.
L’autre poisson roi du coin est la daurade royale que l’on recherche aussi au crabe vert vivant. Ce poisson aussi est très prisé par les guides de pêche qui emmènent ici leur clientèle. Les très beaux poissons n’y sont pas rares et la défense de ces sparidés de belle taille est très violente. N’hésitez pas à pousser jusqu’au pont de Térénez si vous venez par-là, le paysage est à couper le souffle. Attention, ça accroche pas mal sous le pont. En effet, les vestiges de l’ancien édifice se trouvent au fond de l’eau…
Retour aux leurres de surface
Après la pause casse-croûte, c’est bien souvent le moment de s’en retourner. Comptez environ une bonne heure pour revenir vers l’île d’Arun avec la marée descendante. Si les parcs se sont découverts, c’est le moment de sortir les leurres de surface ou juste sous la surface. Le jour où j’y suis allé, le vent s’est renforcé pendant le retour et je n’ai pu exploiter cette opportunité. Les courants autour de l’Île d’Arun, en fonction du flux, sont également intéressants. Les petits poissons nageurs, sur de petits grammages sont à sortir des boîtes à leurres. En conclusion, je recommande ces spots autant pour la pêche que pour la balade.
Si vous partez de l’Île d’Arun, visez un coefficient de 60/70. Mettez-vous à l’eau une heure après le début de montante, le courant vous emportera tranquillement vers le cimetière de bateaux. Attendez l’étale de basse et la bascule pour faire la route retour, n’oubliez surtout pas votre smartphone ou appareil photo. Vous pourriez sans aucun doute le regretter. Portez-vous bien, le kayak ça vous gagne…