1. Le coup du soir
Parlons tout d’abord du moment magique de l’été, le fameux « coup du soir »! À cette période il ne faut pas hésiter à rester au bord de l’eau jusqu’à la nuit. Les éclosions pouvant avoir lieu dans la dernière demi-heure! Il faut se faire discret et savoir parfois juste se placer stratégiquement sur la berge et attendre que l’activité commence. La rivière, qui paraissait morte au plus chaud de la journée, peut alors se réveiller et les gobages se multiplier sur une courte période dont il faut profiter pleinement. C’est souvent l’occasion de pêcher en sèche, avec des mouches de bonne taille. Les sedges sur hameçon de 14 voire 12 peuvent être efficaces même s’il faut s’adapter bien entendu aux insectes qui sortent. Suivant la taille de la rivière, j’utilise une dix pieds soie de 3 sur des cours d’eau petits ou moyens et une classique neuf pieds soie de 5 lorsque je dois allonger un peu la distance et en présence de gros poissons. Les dix pieds soie de 4 à 5 sont aussi tout indiquées en grande rivière, tout comme il vous faudra peut-être une 6,6 pieds soie de 3 pour les ruisseaux à la végétation rivulaire très dense. Légalement, la pêche est possible trente minutes après le coucher du soleil et nos derniers lancers se font souvent dans une pénombre qui ne permet plus de voir les gobages. On dit alors que l’on pêche à « l’oreille ».
2. Le coup du matin
À l’inverse, c’est aussi une période pour les lève-tôt ! Les premières heures du jour, normalement plus fraîches, offrent de belles opportunités de pêche. Les truites sont plus actives et il faut prospecter les bordures dès les premières lueurs. Nos farios viennent alors à la fraîche cueillir quelques nymphes ou spents d’éphémères tombés pendant la nuit mais aussi faire quelques raids matinaux sur les bancs de vairons! Dans ces conditions, il faut pêcher fin et l’on prospecte plutôt à vue. Une canne de neuf pieds pour soie de 3 à 5 est tout indiquée. Le bas de ligne sera long minimum deux fois la longueur de la canne et se terminera par une grande pointe assez fine en douze voire dix centièmes. Cette pêche d’étiage à l’aube n’est pas la plus facile mais quel plaisir de leurrer une jolie fario en maraude en étant tapis sur la berge! La plupart du temps, je n’utilise pas de waders. Un bon pantalon de randonnée ou de treillis qui ne craint plus rien, de vieilles chaussures de marche une boîte à mouche unique avec quelques spents, sedges, oreille de lièvre en sèche, des pheasant tail, cuivres, têtes orange non lestées ou peu lestées et une poignée de gammares légers et le tour est joué! Par acquit de conscience, j’ai toujours un gros streamer type vairon ou chabot qui traîne dans la boîte car on ne sait jamais… Mais tout ça pour dire que l’on voyage léger.
3. Les lacs de montagne
La période estivale marque un des meilleurs moments de l’année pour partir en randonnée vers les lacs alpins ou pyrénéens. Ces superbes biotopes ne se réveillent vraiment qu’en juin voire juillet pour les plus hauts en altitude. Les truites et autres ombles qui peuplent ces eaux glacées profitent des beaux jours pour se refaire une santé! On peut distinguer deux types de lacs, naturels ou de barrage. La majorité du temps les premiers conviennent mieux à la pratique de la pêche à la mouche alors que les seconds sont souvent très grands et surtout très profonds. Cependant, un autre élément majeur à prendre en compte est la possibilité ou non de reproduction naturelle dans ces plans d’eau d’altitude. Il est donc primordial de consulter les sites Internet des fédérations de pêche qui gèrent les lacs que vous voulez pêcher. Certains, qui paraissent magnifiques sur votre carte IGN ou sur Google Earth, peuvent être totalement vides si pas alevinés depuis des années… Au contraire, une petite « jasse » alimentée par un ruisseau pépinière pourra abriter de superbes poissons sauvages. Toutes les techniques peuvent fonctionner, même si la pêche à vue en sèche et en nymphe reste la reine des pratiques en montagne. Sur les grandes retenues, le streamer permet souvent de prendre plus de truites car il permet de prospecter de plus vastes étendues. L’idéal est de dormir sous la tente ou dans un refuge non loin du lac que l’on veut découvrir car les coups du soir sont souvent magnifiques dans ces paysages de rêve. La fragilité de ces milieux nous impose en revanche une pêche en no-kill strict lorsque les salmonidés peuvent se reproduire. La montagne est aujourd’hui prise d’assaut chaque été par un nombre accru de touristes, certains n’ayant pas assez de respect pour ce fabuleux environnement d’altitude.
4. Les ruisseaux de montagne
L’autre biotope à privilégier en période estivale est le torrent de montagne. Votre randonnée vers l’étang de votre choix peut vous amener à longer de superbes ruisseaux. Ils sont souvent les exutoires des lacs d’altitude et la fraîcheur de leurs eaux est parfaite pour les salmonidés, même au plus chaud de l’été. Ils cascadent dans les roches et permettent une forte oxygénation de l’eau. Plus vous marcherez et plus la pêche sera bonne en général, cela vaut également pour les plans d’eau d’ailleurs… Ainsi, les torrents en amont des lacs où peuvent remonter les poissons sont souvent les meilleurs. La pêche y est très ludique car les truites des sommets sont rarement regardantes sur ce qu’on leur propose. Une grosse mouche sèche type parachute, sedge ou encore une imitation bien dodue d’insecte terrestre fait souvent très bien l’affaire! Une 10 ou 10,6 voire 11 pieds soie de 2/3 est parfaite pour cette technique car nous allons prospecter les postes rapidement en remontant le torrent et en « tapant l’eau » canne haute. Si l’activité est faible ou que l’on arrive sur une vasque profonde, il est intéressant de passer en « dropper » ou sèche/ nymphe. Il faut alors attacher un petit casque d’or par exemple sous votre parachute ou sedge. Suivant la profondeur des coups que vous pêchez, la nymphe est placée entre trente centimètres et un bon mètre en dessous. Il existe trois façons de l’attacher. Soit directement dans l’œillet de la sèche, soit en faisant une petite potence sur votre pointe à la distance désirée entre les deux, soit en la nouant sur la hampe.
5. Les têtes de courant
Lorsque vous découvrez un parcours en plein été, un des postes qu’il faut absolument pêcher est les « têtes de courant ». Ce sont les parties les plus oxygénées de la rivière et elles attirent souvent les beaux poissons en quête d’un repas. Plus la zone est agitée et mieux c’est ! Dans ces eaux tumultueuses voire « blanches », la pêche en nymphe au fil est reine. Je vous conseille une canne spéciale nymphe de 10,6 à 11 pieds pour soie de 3 qui est un bon compromis et vous permettra de pêcher la plupart des cours d’eau. Le bas de ligne doit être long pour faciliter le lancer des nymphes et surtout améliorer les dérives. Les soies spéciales « Euronymphing » de 0,55/100 de diamètre sont très bien adaptées à cette technique. Sinon, les bas de ligne type « French Nymphing » en nylon dégressif ou en « queue-de-rat » faisant souvent 9 ou 10 mètres qui permettent d’expédier plus facilement les nymphes légères. Dernière solution, la façon Espagnole avec seulement sur le moulinet du fil non dégressif en 18 ou 20 centièmes au moins une dizaine de mètres puis votre fil fluo qui sert d’indicateur de touche et enfin votre pointe. Ces « râpes » au courant rapide se prospectent à l’aide de deux nymphes. En pointe, un jig est tout indiqué et il faut choisir la taille de la bille en fonction du courant et de la profondeur du secteur. L’idéal étant de ralentir un peu la dérive de nos artificielles pour laisser le temps aux truites postées dans ces têtes de courant d’intercepter nos mouches.
6. Les pools profonds
A l'inverse des "râpes", les gouffres sombres offrent un habitat de choix pour nos salmonidés lors des semaines les plus chaudes de l’année. Ces postes ne sont pas faciles à pêcher au fouet mais méritent quelques lancers à l’aube ou au crépuscule lorsque l’on recherche les beaux poissons. Petit aparté pour dire que sur les rivières de plaine ou de piémont, la température de l’eau est un facteur primordial à prendre en compte et cela malheureusement de plus en plus souvent avec le manque d’eau. Au cœur de l’été, il faut la vérifier et si elle approche d’une vingtaine de degrés, ranger nos cannes au râtelier… Capturer une truite dans ces conditions serait la condamner presque à coup sûr ! Mieux vaut alors se rabattre sur nos amis les chevesnes ou les barbeaux, plus résistants aux températures élevées. Ces pools profonds sont intéressants surtout au streamer avec une soie à pointe plongeante sur laquelle on noue un court bas de ligne deux mètres maximum et une grande mouche articulée imitant un chabot par exemple. C’est une pêche itinérante où il ne faut tenter notre chance que dans les gouffres les plus prometteurs et pouvant servir de refuge à nos grosses farios. En plein été, il est encore possible de prendre de gros poissons mais les fenêtres de pêche se resserrent comme peau de chagrin car en pleine journée cette technique est en général inopérante.
7. Les cours d’eau ombragés
En plaine, il faut aussi rechercher les petites rivières forestières ou qui possèdent une forte végétation rivulaire qui crée de l’ombre salvatrice au plus chaud de l’été. J’ai fait mes armes sur ce genre de cours d’eau, en Bretagne et j’adorais pêcher le haut de l’Odet en période estivale. Armé d’une 6,6 ou 7 pieds, je peignais en sèche les postes les plus prometteurs sous les branches, le long des souches et des berges creuses où encore je cherchais les gobages discrets de ces jolies petites farios sauvages. Le bas de ligne doit être court pour pouvoir fouetter facilement en passant sous les arbres et privilégier la précision à la longueur de dérive souvent très restreinte. Une fois la taille de la canne est souvent suffisant pour être efficace. Les mouches sèches sont à privilégier comme les sedges en plumes ou en poils, les parachutes mais aussi les CDC et ODL de taille moyenne. La pratique de la sèche/nymphe donne aussi de très bons résultats lorsque l’activité de surface est trop timide. Il faut alors choisir les postes les plus profonds et pouvant cacher nos salmonidés car, comme en torrent de montagne, ce sont souvent les spots qui concentrent le plus de truites. De nombreuses régions en France ont ce genre de petites rivières ombragées où l’on prend rarement de grosses truites mais qui offrent une pêche très ludique et de superbes balades halieutiques « à la fraîche », même en été.
8. Profitez des conditions météo
L’été est aussi une saison où la météo doit être scrutée régulièrement et influence grandement la pêche. À l’inverse de l’ouverture où nous prions pour un redoux et une éclosion en début d’après-midi, en été nous espérons une dépression faisant tomber les températures et apportant la pluie. Un temps couvert et frais favorise l’activité des salmonidés et il ne faut alors pas hésiter à prendre la clé de la rivière, canne en main. Mieux encore, un temps lourd et orageux est normalement gage de réussite ! Avant l’orage les poissons se mettent en général à s’alimenter franchement. C’est le moment des retombées de fourmis ailées mais aussi d’autres insectes terrestres parfois projetés à la surface de l’eau par les vents violents et soudains de ce type de phénomènes météorologiques. Il en va de même pour les petits scarabées mais aussi les sauterelles par exemple sur un cours d’eau serpentant dans une prairie herbeuse. Lorsque l’orage se déchaîne, il faut bien entendu se mettre à l’abri et surtout poser sa canne en carbone à bonne distance… Une fois fini, l’eau monte et se trouble en général assez vite. Ce moment peut être excellent, avec une forte activité des truites avant que le cours d’eau ne soit trop boueux et plus pêchable au fouet. Il faut alors tenter sa chance en nymphe au fil, en prospectant les bordures d’où se rapprochent les poissons. Pour les amateurs, c’est le moment de sortir les fameux et controversés « squirmy wormy » ! Ces imitations de vers de terre en matière souple, dignes descendants des « San Juan Worm » en chenille, sont en effet très efficaces dans ce genre de conditions. Bien entendu cette petite liste est loin d’être exhaustive, les « chalkstreams » ou résurgences alimentées par des sources sont aussi intéressants en été, tout comme les parcours à l’aval direct des barrages et alimentés par le fond du lac. La température de l’eau y reste alors très acceptable voire parfaite pour nos salmonidés.